Sébastien a de nombreuses passions dans la vie. Son intérêt pour l’art du bonsaï a commencé à l’âge de 12 ans et ne l’a jamais quitté. Lorsqu’il arrive à Bruxelles en 2010, il rencontre le Maître Bonsaï Marc Bauwens, et lui propose de l’aider dans sa serre tous les vendredis après-midi en échange d’apprendre auprès de lui, en tant qu’expert Européen en Azalée Japonica (Satsuki). Sébastien part en Australie en 1999 pour organiser des concerts pour les Jeux Olympiques de Sydney. Il a toujours été impliqué dans la gestion de projets, d’événements, de théâtre et de concerts en Australie, en Nouvelle-Zélande, en Asie et aux États-Unis. Il a ainsi fait la rencontre du Dalai Lama. Il change de carrière à la suite de la crise financière de 2008 et crée sa propre boite de consulting en business development anglophone. |
L’art du bonsaï et la croissance personnelle
Avant de parler de bonsaïs, il faut s’assurer que nous parlons bien de la même chose. Pour la plupart des gens, un bonsaï est une petite plante, généralement un orme de Chine, acheté dans un magasin de bricolage, qui meurt après quelques semaines, ou en quelques mois si vous avez de la chance.
D’autres pensent qu’il s’agit d’un type de plantes, et non d’une technique qui peut être appliquée à la plupart des arbres ou des buissons. Pour moi, ces arbres contribuent autant à l’art du bonsaï que la restauration rapide contribue aux étoilés Michelin. De plus, ces arbres produits en masse nuisent à cet art et à tout ce que la culture et la philosophie des bonsaïs représentent. Paradoxalement, c’est l’un de ces arbres qui a déclenché ma passion pour cet art.
Je ne vais pas me pencher sur l’historique de cet art, mais plus précisément sur ses aspects multidimensionnels et sur la façon dont la culture des bonsaïs est étroitement liée à la croissance personnelle.
Pour dissiper certaines idées fausses, la culture des bonsaïs est une technique et une philosophie appliquées à un arbre ou à un buisson que l’on fait pousser à partir d’une graine ou d’un petit spécimen dans un pot, ou un spécimen prélevé dans la nature, Yamadori. Cette technique peut donc s’appliquer à tout arbre ou buisson dont les branches et les racines peuvent être coupées sans mettre l’arbre en danger. Certaines espèces ne conviennent pas pour cette raison, ou simplement parce que leurs feuilles sont trop grandes ou poussent trop vite pour obtenir l’aspect naturel recherché.
En regardant un bonsaï, un véritable chef-d’œuvre vous surprendra par son air tout à fait naturel, ayant le calme majestueux d’un vieil arbre au milieu d’une prairie. Le bonsaï ne présentera aucun signe d’intervention humaine, comme si l’arbre aurait été délicatement prélevé dans la nature, où celle-ci l’a soigneusement façonné pendant des siècles, avant que vous ne le fassiez rétrécir et le mettiez en pot.
J’aime utiliser le mot « soignant (carer en Anglais) » et non « propriétaire » pour désigner les bonsaïs, car cela change la façon d’appréhender l’arbre.
Si vous croyez être le propriétaire d’un arbre, vous avez tendance à oublier que l’arbre vous survivra des centaines d’années si vous en prenez soin correctement.
Votre mission est d’accueillir un arbre sous votre responsabilité, puis de faire de votre mieux jusqu’au jour, où vous donnerez l’arbre à un autre soignant lorsque vous ne pourrez plus le faire vous-même, ou si vous souhaitez vous concentrer sur d’autres arbres.
Si vous vous occupez d’un arbre déjà âgé, en confiant cet arbre à vos soins, vous entrez dans la lignée des soignants qui ont participé au bien-être de cet arbre au cours de sa vie. En d’autres termes, vous êtes au service de cet arbre, et non l’inverse. Cette notion peut s’appliquer à d’autres aspects de la vie, et à tout ce qui a une échelle de temps plus longue que la vôtre.
La maîtrise de l’art du bonsaï est une mission de toute une vie, car le soignant devra acquérir et maîtriser de nombreuses compétences variées en les combinant judicieusement pour servir les intérêts de l’arbre.
Biologie
Un bonsaï est dans un état d’équilibre instable constant, totalement dépendant de l’aidant pour répondre à ses besoins. Afin de prendre soin d’un arbre de manière appropriée et adéquate, le soignant devra comprendre comment fonctionne un arbre.
Quel est le cycle de vie de l’arbre ? Comment boit-il ? Assimile les nutriments ? Respire ? Transpire ? Grandit ? Communique ? lorsqu’il est confronté à un problème, tel qu’un manque ou un excès d’eau, de soleil, de nourriture, une carence, une maladie.
D’une certaine manière, il est similaire à la relation qui se développe entre un nouveau-né et ses parents. Les premiers mois et les premières années consistent à apprendre à communiquer et à être compris pour le bénéfice des deux. Ainsi, le premier apprentissage est technique et biologique. (pour aller plus loin voir https://baozoom.com/la-theorie-de-lattachement-et-le-coaching/)
Botanique
Chaque espèce a ses propres particularités, son cycle et ses moyens de communication. Un arbre persistant aura un cycle de vie différent de celui d’un arbre à feuilles caduques. Un pin blanc aura un sol complètement différent des besoins d’acidité de l’azalée. Un érable concentrera sa croissance sur son apex au détriment des branches inférieures, alors qu’une azalée fera exactement le contraire. La taille d’un érable consistera à couper sévèrement l’apex, pour permettre à la sève d’être redirigée vers les branches inférieures, sinon l’arbre risque de les abandonner. Faire cela à une azalée compromettrait sans aucun doute ses chances de survie. Il existe de nombreux types d’arbres, et vous devez apprendre et comprendre comment prendre soin de chaque espèce dont vous décidez de vous occuper, ce qui en fait une mission à vie.
Posture d’apprentissage
La posture d’apprentissage est cruciale. Si vous imaginez trois chaises de la connaissance, la première étant celle du novice, la deuxième celle de l’intermédiaire et la troisième celle de la personne qui sait, il est crucial de garder la posture du novice à tout moment, car elle vous permettra de garder l’esprit ouvert et la soif de connaissance à son comble. Là encore, cette posture d’apprentissage peut être appliquée à tous les aspects de la vie. On peut avoir l’impression d’en savoir beaucoup sur un sujet spécifique, mais la connaissance est comme un désert plein de dunes, chaque dune représentant le processus d’apprentissage sur un aspect d’un sujet. Vous apprenez au fur et à mesure que vous progressez en escaladant cette dune. Mais une fois que vous êtes au sommet, il est important de se rendre compte qu’il y a d’autres dunes et d’autres processus d’apprentissage pour lesquels vous devez vous positionner en tant que novice au pied de chaque dune. En acceptant ce cycle d’apprentissage, et le fait que vous ne saurez jamais tout sur un sujet, vous gardez l’humilité sur toute déclaration que vous faites, et vous éloignez l’assurance inflexible d’avoir raison. Vous pouvez penser que vous avez raison, mais il vous manquera toujours un peu d’apprentissage pour comprendre pleinement une situation. L’humilité dans l’utilisation de vos connaissances est indispensable, car elle pourrait compromettre les chances de survie de l’arbre, en prenant la mauvaise décision basée sur l’illusion d’avoir raison.
Esthétique
Comprendre les aspects esthétiques d’un arbre est primordial pour en prendre soin. Les maîtres japonais ont codifié la beauté d’un arbre en l’observant dans la nature. Ils commencent par regarder de nombreux arbres, ils comprirent peu à peu ce qui rend un arbre majestueux et un autre plutôt commun. Ces règles d’or esthétiques ont ensuite été transmises de maîtres à disciples pendant des générations.
Mais pour bien comprendre ces règles, il faut au préalable apprendre à observer la nature, à observer les informations que votre environnement est capable de vous fournir. Chaque arbre dans la nature vous raconte une histoire, sa forme est comme un livre ouvert sur ce qu’il s’est passé au cours de sa vie. Du type de croissance en groupe forestier, prenant soin les uns des autres, collaborant et rivalisant, à l’arbre solitaire, survivant, et témoignage d’un long passé.
Le développement d’un sens aigu de l’observation de la nature, de l’environnement et le développement d’une conscience accrue joueront un rôle crucial dans la capacité à prendre soin d’un arbre.
Potentiel
A moins que votre arbre ne soit déjà bien établi et très vieux, ce qui nécessite plus un entretien que le développement de son plein potentiel, tout soignant devra être capable de voir le potentiel de l’arbre et collaborer avec lui pour l’atteindre. Pour cela, vous devrez développer un œil pour ce que l’arbre pourrait être dans les années à venir. Un plan de croissance sera mis en place et divisé en plusieurs phases pour le mener à bien. Collaborer avec l’arbre et l’aider à sublimer son potentiel nécessitera des connaissances, de la flexibilité, de la collaboration, de la patience et de l’humilité. Le soignant devra constamment ajuster son plan d’action en fonction de l’état de l’arbre et de sa réaction au plan de croissance. En de nombreuses occasions, ce plan devra être ajusté, modifié, reconsidéré, pour prendre en considération ce que l’arbre dit. En fin de compte, c’est toujours l’arbre qui décidera, plus vite vous le comprendrez, mieux ce sera.
Perfection
La recherche de la perfection est une épée à double tranchant, car la perfection peut signifier tout et n’importe quoi. Il est donc primordial de définir ce que l’on entend par perfection tout en prenant soin d’un arbre, car cette perfection pourrait tout aussi bien conduire à la magnificence ou au désastre. Ma compréhension de la perfection est le délicat exercice d’équilibre qui consiste à combiner tous les aspects des soins, tout en collaborant constamment avec l’arbre et en l’aidant à sublimer son potentiel, tout en acceptant ses défauts, vos erreurs due à votre manque de connaissances et d’expérience.
Un arbre parfait et magnifique aura des défauts et des cicatrices. En fait, sa magnificence est basée sur son histoire, une histoire à succès parsemée d’accidents et de difficultés.
Défaut
La perfection n’existe pas dans la nature, c’est pourquoi la recherche de la perfection dans l’entretien d’un arbre joue contre l’aspect naturel que vous recherchez. Un plateau ne doit jamais être parfaitement plat, mais ondulé et incurvé et s’intégrer parfaitement aux autres plateaux. Il faut aider l’arbre à se guérir lui-même des accidents, mais il faut que les cicatrices fassent partie de ce qu’est l’arbre, car elles lui apporteront de l’authenticité.
Patience
La patience est un élément crucial de la culture des bonsaïs. On ne peut pas utiliser son propre agenda pour forcer un arbre à faire ce que l’on veut. Un arbre peut avoir besoin de soins 10, 20, 50 ans ou plus avant d’atteindre sa magnificence, et pendant ce temps, l’arbre ne sera pas au mieux de sa beauté, mais ces étapes sont nécessaires pour atteindre son plein potentiel.
Souvent, travailler sur un bonsaï est une succession constante d’actions, et laisser l’arbre grandir et … laisser au temps de faire son travail.
L’indulgence de l’arbre
Selon l’espèce, l’arbre sera indulgent jusqu’à un certain point. Certains seront plus indulgents que d’autres, mais comme toute chose dans la vie, les erreurs peuvent être pardonnées, à condition qu’elles ne soient pas trop graves, car elles pourraient finalement coûter la vie à l’arbre. Vous êtes ici pour prendre soin d’un être vivant, décider de quelque chose qui pourrait coûter la vie à l’arbre n’est pas quelque chose à prendre à la légère.
Apprenez à écouter un arbre, à comprendre ses besoins. L’arbre vous dira tout ce que vous avez besoin de savoir, à condition que vous appreniez son langage. Il est donc essentiel de développer une meilleure prise de conscience et de demander conseil chaque fois que vous ne comprenez pas ce que l’arbre essaie de vous dire.
Lorsque vous prenez soin d’un arbre, l’humilité peut faire la différence entre la vie et la mort pour votre arbre.
La bonsaï coaching/thérapie
Je souhaite utiliser cet art comme une façon concrète pour une personne de tester son niveau de conscience et à quel point la perception des choses est dictée par notre niveau de conscience. En développent son savoir, en faisant preuve de curiosité, de se poser des questions, de chercher des réponses, on arrive ainsi à augmenter son niveau de conscience. Pour cela la nature est une source inépuisable d’inspiration.
Le bonsaï peut tout à fait être substitué par une promenade en forêt ou même en ville. Un simple arbre de ville donne déjà une quantité importante d’information pour celui qui connaît son langage.
L’avantage du bonsaï est lié à sa dépendance vitale envers son soigneur. Celui-ci doit dès lors acquérir les connaissances nécessaires pour se substituer partiellement à la nature, pour s’assurer du bien-être de l’arbre. Ces connaissances peuvent tout à fait s’acquérir sans pour autant générer une augmentation du niveau de conscience.
Le fait de s’intéresser trop superficiellement au comment et pas au pourquoi et au comment dans une approche holistique est un piège classique dans l’art du bonsaï.
Quand une personne me demande pourquoi son ficus n’est pas bien, je demande toujours la dernière fois qu’il a bu, puis la dernière fois qu’il a mangé. A cette deuxième question, il n’est pas rare que la réponse soit : manger ? comme si une plante n’avait besoin que d’eau, comme si un être vivant n’avait besoin que d’eau. Nous ne demanderions jamais à un être humain de ne vivre que d’eau.
J’espère que ce texte d’introduction vous donnera un aperçu de l’étendue de cette forme d’art extraordinaire, et de la façon dont quelque chose qui peut sembler artificiel à première vue, est en fait plus proche de la nature qu’il n’y parait. L’art du bonsaï est une passion de vie que l’on exerce sans perspective d’achèvement, et c’est peut-être là sa plus grande leçon.
Sébastien ROTHAN-LEDOUX
Sebyone@mac.com
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Catégories :Actualité Ecole Elan Vital, Témoignages
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