Burn-out : le cadeau du Père absent ?

De plus en plus de professionnels de la santé au travail font le lien entre le burn-out et l’évolution ultra-libérale de la société. Mais bon nombre d’entre eux lui trouvent aussi ses origines profondes dans l’éducation. Les deux opinions sont sans doute complémentaires. Mais auraient t-elles un dénominateur commun ?

Et si c’était la famille d’origine ? Et les comportements ‘dominant-dominé’ qui y germent et s’y développent ?

Car c’est bien là le paradoxe de ce fléau qu’est le burn-out et dont les manifestations sont de plus en plus préoccupantes entraînant des dégâts collatéraux dont nous n’avons sans doute pas encore mesuré l’ampleur. Paradoxe car si les causes se trouvent à l’endroit de nos racines familiales, les solutions le sont tout autant. Et ce constat vaut tout autant pour les ‘victimes’ du système (ceux qui tombent malades) que pour les bourreaux (ceux qui, prétendument, rendent les autres malades en exerçant une pression directe ou manipulatoire).

Nous avons déjà abordé dans divers articles le thème des ‘petites’ voix du passé étudiées en analyse transactionnelle. Ces injonctions parentales : « sois fort », « sois parfait » « fais plaisir » « fais vite » « seul l’effort compte » et bien d’autres encore … sont des graines idéales pour faire germer la maladie.

Nées dans l’environnement familial ces petites voix sont les conséquences des actes parentaux plus encore que des messages qu’ils transmettent à leurs enfants. Faites ce que je dis mais pas ce que je fais … Ces messages subliminaux envoyés par les parents forment un amas de croyances dans la psyché des enfants. Amenant ceux-ci à agir à l’encontre de leurs besoins les plus fondamentaux.

Si on y regarde d’un peu plus près, on constate souvent que ces petites voix apparaissent à mesure que la « fonction paternelle saine » diminue dans la famille.

Le « burn-out » serait-t-il donc un des héritages du ‘Père’ absent ?

Faisons-en l’hypothèse en prenant garde de ne pas tomber dans les généralisations ou simplifications qui s’accommodent mal de la complexité rencontrée au sein des relations familiales.

Et levons tout d’abord trois malentendus potentiels, histoire de bien se comprendre :

  • La fonction paternelle n’est pas l’apanage du papa. Idéalement, la maman devra aussi l’inclure dans l’éduction qu’elle prodigue à ses enfants. Il s’agit donc plus d’énergies et de comportements non liés au sexe du parent. Pour le dire autrement, une maman peut faire du ‘Père’ autant qu’un papa.
  • L’absence de Père ne signifie pas que papa ou maman soient rarement voire jamais à la maison. En effet, les parents peuvent être présents physiquement mais pas affectivement. Ainsi, les papas et les mamans entièrement absorbés par leur boulot ou leurs soucis personnels sont souvent éteint(e)s quand il s’agit d’assumer leur ‘fonction Paternelle’.
  • Enfin – et c’est sans doute là l’essentiel et le moins visible – une fonction paternelle ne sera saine que si elle se fonde sur un rapport pacifié avec le Féminin. En d’autres mots, un papa ou une maman ne cultivant que les qualités dites Masculines (Yang) est un(e) incubateur (incubatrice) de burn-out voire de pathologies mentales plus sévères encore.

Si le papa et/ou la maman n’équilibrent pas sainement leurs énergies Masculines (YANG) et Féminines (YIN), cela génère souvent une énergie YANG hypertrophiée, malade et toxique. Inutile d’ajouter que si les deux parents tombent dans ce piège, le cumul risque de s’avérer encore plus problématique pour l’enfant et son développement.

Alors, quelles sont ces qualités « Masculines » qui – lorsqu’elles sont hypertrophiées ou carencées – conduisent au déséquilibre et ensuite à la maladie ? En voici quelques-unes, la liste étant loin d’être exhaustive.

Masculin (Yang) Féminin (Yin)
Force Retenue (tact)
Compétition Coopération
Raisonnement Emotion
Distance juste Empathie
Parole Ecoute

Plus symboliquement, le YIN connecte et fusionne. Il ne connait pas de frontières. Ne construit pas de murs.

Le YANG quant à lui sépare et distingue. Il pose des limites et des frontières.

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Pour la médecine chinoise traditionnelle qui voit le burn-out comme un déséquilibre pathologique entre les énergies YIN et YANG, il est essentiel pour rester en bonne santé d’avoir une bonne dose de YIN sans laquelle un YANG bien équilibré ne pourrait germer.

Pour le dire autrement, un YANG bien développé sans les racines profondes d’un YIN sain est un YANG potentiellement malade. Un YANG douloureux, générateur de souffrance pour soi et pour les autres.

Il est évident qu’un YIN sans assez YANG sera également dévastateur. Et même mortel : pour le médecin chinois, la séparation des deux énergies complémentaires YIN et YANG entraîne la mort.

Tandis que la « bonne santé » en chinois se dit ‘YIN PING YANG MI’, ce qui signifie YIN paisible ET YANG caché.

Décodons …

Que veut dire YIN paisible ?

Le YIN paisible peut être comparé à l’énergie d’un nouveau-né venu au monde dans de bonnes conditions : vulnérable et néanmoins en confiance totale envers le monde qui l’entoure. C’est la capacité à se laisser porter par la Vie (les parents au départ, le plus souvent mais pas obligatoirement). C’est la parfaite écoute de ses besoins essentiels. C’est la capacité de ‘SENTIR’ corporellement ce qui est bon pour soi. C’est le lâcher-prise tant recherché à l’âge adulte. Ce qui manque au nouveau-né, c’est la parole. La PAROLE : outil du YANG par excellence. Elle viendra avec le temps et l’apprentissage mais aussi avec les inévitables blessures et traumatismes, petits ou grands.

Que signifie YANG caché ?

Le YANG est l’énergie qui dirige. Qui sépare. Qui EXPRIME et MANIFESTE grâce à la parole (notamment) le tri entre ce qui est bon pour soi et ce qui ne l’est pas est. S’il repose sur une énergie YIN en bonne santé, le YANG n’a pas beaucoup besoin de s’afficher. Comme le disait Lao Tseu, montrer sa force est un signe de faiblesse.

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Or, beaucoup de travailleurs soumis au stress sont embarqués dans une course au résultat, à la performance. Pour certains, les qualités YANG sont hypertrophiées ou carencées. Elles conduisent à des excès ou à des manques. Excès ou manque de force, excès de compétition, excès de raisonnement, ….). Le YIN , souvent, en souffra : plus de place pour les ressentis, l’empathie … Ces travailleurs croient être contraints d’ignorer leurs besoins primordiaux. Beaucoup ne sentent même plus leur fatigue. Ignorant les signaux de leurs corps, ils bossent jour et nuit au mépris de leur santé et de leurs relations (à commencer par la relation qu’ils entretiennent avec eux-mêmes).

Ce sont le plus souvent des peurs qui les guident : la peur de ne pas être à la hauteur. De ne pas être apprécié par le ‘système’. D’être rejeté ou abandonné. Trahi ou humilié.

Ces bosseurs fous témoignent d’une loyauté sans faille aux messages parentaux implicites. Ils se comportent en fait comme des petits enfants à la recherche de la reconnaissance des parents. A la recherche d’un amour conditionné à leurs exploits. A leurs comportements et capacités. Puisqu’ils ne sont pas aimés pour ce qu’ils sont, ils vont développer des stratégies d’excellence pour être aimés pour leurs compétences. Cette confusion profonde entre l’amour inconditionnel et la reconnaissance trouve sa source très tôt dans la vie. Dans le regard des parents. Et/ou de celles et ceux faisant fonction.

Plus tard, à l’âge adulte, cela donne des ‘grands’ qui bâtissent leurs relations sur des rapports de force. Sur des rapports ‘dominant – dominé’. Sur des triangles dramatiques (Persécuteur – Victime – Sauveur).

Chose étonnante, ces loyaux enfants qui ont souffert (inconsciemment ou pas) de la pression qu’ils se sont infligée pour être aimés par leurs parents reproduisent souvent les mêmes schémas vis-à-vis de leurs propres enfants. Et de leurs collègues.

La voie juste pour sortir de ce cercle vicieux intergénérationnel est simple. En théorie du moins. Pour la pratique, c’est autre chose.

Pierre Lucas

Il s’agira d’abord d’être au clair avec ses besoins et sensations. Notamment par rapport à notre estime de soi. A l’amour que l’on se porte. Se reconnecter à soi en profondeur. Bref : retrouver son YIN enfoui, rejeté voire refoulé. S’aimer sans passer obligatoirement par le regard évaluateur ou jugeant des parents qui reste imprimé dans la psyché.

Ensuite, et ensuite seulement, le moment viendra pour exprimer ses besoins. Avec force et clarté (YANG) sans lâcher la douceur (YIN).

Vaste programme. Le travail d’une vie, sans aucun doute.

 

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2 réponses

  1. Merci pour cet article Pierre, très intéressant. Il me semble que le rapport dominant-dominé est partout dans la société, ne serait-ce pas aussi dû à notre passé de gibier potentiel ? Moi je vois cette emprise bien plus profondément inscrite dans notre premier cerveau… dominer pour manger et ne pas être mangé.

  2. Merci pour cet article Pierre, très intéressant. Il me semble aussi que le rapport dominant-dominé est partout dans la société au-delà des relations qui mènent au burn out. N’est-ce pas aussi dans les origines de la construction de notre premier cerveau qu’on peut trouver une explication à ce mécanisme, quand on était un gibier potentiel ? Dominer pour manger et ne pas être mangé… la loi du plus fort, en d’autres termes ?

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